|
Ils
entretiennent entre eux des rapports complexes et secrets. Pour étudier ces
rapports, pour comprendre par exemple comment le chêne abrite la truffe, et
pourquoi les lactaires sanguins et délicieux poussent uniquement sous les pins,
nous allons devoir plonger sous la terre, l' où débutent les noces de l'arbre et
du champignon. Mais nous aurons besoin, auparavant, de quelques définitions.
Le "champignon" tout d'abord,
s'entend ici au sens de l'espèce vivant toute l'année dans
le sol, sous forme de filament, le Mycélium (ou blanc du champignon),
qui rappelle l'aspect du coton. Le "chapeau" qui apparaît à
l'automne, (ou quelquefois au printemps), n'est que la partie visible de
la plante, que l'on peut comparer au fruit du végétal classique.
Le champignon donc, est une plante dépourvue de chlorophylle, et
par conséquent, incapable d'utiliser l'énergie lumineuse
pour fabriquer des molécules hydrocarbonées ("les sucres")
qui lui sont indispensables. Il va donc, tout naturellement, puiser son
énergie en dégradant les substances glucidiques du substrat
sur lequel il se trouve.
Trois types de relations vont
pouvoir s'instaurer entre le champignon et son support :
Dans le sol, le champignon
entre en contact avec les radicelles de l'arbre, pour constituer un nouvel
organisme, qui n'est plus ni une plante, ni un champignon.
Au sein de ces mychorizes,
tantôt en forme d'amas, etc... les cellules végétales
sont isolées entourées par un véritable réseau
de filaments d'origines mycéliennes, et les échanges vont
pouvoir commencer. L'arbre, nous l'avons vu, va fournir les éléments
énergiques dont le champignon à besoin. Celui-ci, en échange,
va apporter à l'arbre les minéraux qu'il a la capacité
de capter plus facilement, et notamment du phosphore accélérant
ainsi la croissance de l'arbre, d'autant plus nettement que le sol est
relativement pauvre.
La moitié environ des espèces de champignon est susceptible de former des mychorizes, les arbres concernés constituent la quasi-totalité du peuplement de nos forêts :
La spécificité
des relations champignon-arbre est parfois très étroite :
le mélèze accueil quatre bolets, et quatre seulement, qui
sont eux incapables de pousser sur un autre arbre. Le chêne accueille
une multitude d'espèces, dont certaines lui sont tristement liés
(comme l'hygrophore russule), d'autre comme la truffe, pouvant choisir
aussi bien les noisetiers, les charmes ou les tilleuls. Parfois, le champignon
peut s'accommoder d'un genre entier d'arbre, certains bolets poussant sous
les arbres du genres pinus, ou groupe tout entier résineux (exemple
: tricholome équestre).
A l'extrême, certains
champignons se marient avec les arbres les plus divers, le cèpe
que l'on rencontre aussi bien sous les épicéas que sous les
châtaigniers... C'est ainsi que le lactaire délicieux pousse
sous les pins, et pas sous les chêne, ni ailleurs sous les épicéas
(où il est remplacé par le lactaire deterrimus), ou les sapins
(où l'on trouve le lactarius salmonicolor).
Par conséquent, les arbres ont donc besoin pour se développer, surtout si le sol est pauvre, d'un certain nombre d'espèces de champignons. La plupart du temps, l'arbre va trouver dans le sol où l'on plante, un ou plusieurs de ces champignons avec lesquels on peut se marier". dans le cas contraire, c'est l'échec que l'on constate, par exemple, lors d'essais d'implantations forestières d'arbres exotiques, qui ne rencontrent pas toujours un champignon de "connaissance". Ce qui veut dire que cette symbiose, jouant sur les "pinacés" et les "feuillus apétales" a rendu ces arbres particulièrement adaptés, à tel point que les espèces d'arbres non mychoïsiques ont été, par compétition, éliminés au fil du temps. Les arbres ayant "choisi" l'alliance avec les champignons ont acquis le monopole du peuplement des forêts. Autant dire que sans les champignons, nos forêts et notre planète ne seraient pas tout à fait ce qu'elles sont ...
Bibliographie : G. CHEVASSUT, Biologie et Écologie des Champignons